jeudi 3 mars 2011

MEMINERAM.

J'ai dit un jour, il y a presque un an, que j'écrirai ma souffrance. Que vous devriez brûler ces pages avant qu'elles ne vous brûlent. Peut-on tout effacer ? Je voudrais tout rayer, tout tout tout rayer, ne plus parler de Loic. Je ne sais pas si je peux y arriver. Je ne sais pas si je peux cesser de souffrir, pour de bon. Et ce soir, alors qu'il est absent, virtuellement comme physiquement -surtout physiquement- et que je relis les anciennes pages de ce blog, elles m'apparaissent comme autant de vestiges morts qui soudain se réveillent et me griffent le visage, je ne peux pas me dire, je ne peux pas reconnaître qu'un jour j'ai pu éprouver ces sentiments, tellement cela a pu me faire du mal, tellement cela a pu me briser comme un coque de bateau jetée sur les rochers. Je lui ai trouvé des excuses. Je me suis courbée, si courbée que je ne pouvais plus écrire que dans la douleur et le désespoir. Les émotions extrêmes perçaient seules la surface du l'armure que je m'étais constituée. Je me sentais vulnérable. Je me sentais toujours la proie des critiques, des rires, des insultes.


J'aurais donné ma vie pour ce garçon. Je le voulais. Comment ai-je pu me tromper ? J'ai toujours cru que ce genre de sentiment était invulnérable. La chute fut difficile. Pendant des mois, de février à juin, je me raccrochais à lui, je ne voulais pas le lâcher. Pourquoi s'accrocher ? Par sécurité, par habitude, par peur d'être seule surtout, oui, surtout, par peur d'être seule. Le vide de ma vie, sans le rôle d'élément structurant qu'il jouait, m'apparaissait comme trop insupportable. Oui, j'ai été lâche, et égoïste, et peut-être que j'ai mérité ma souffrance. Je voudrais croire que non. J'ai essayé de lui faire comprendre, de provoquer chez lui un déclic : il n'était simplement pas fait pour moi, je n'ai pas voulu l'accepter, me l'avouer. Comme quoi, l'amour rend bien aveugle. 


Et pourtant, je n'ai pas été honnête avec lui, jusqu'au bout. Il y avait déjà quelqu'un d'autre avait que notre relation soit enterrée. J'ai honte. J'ai terriblement honte. J'ai toujours dit que jamais, au grand jamais, je ne pourrais pardonner l'infidélité. "Ne fais pas aux autres ce que tu n'aimerais pas qu'on te fasse". Ne me blâmez pas, je me suis assez blâmée moi-même. Les coups de fouet, je me les suis donnée seule, dans l'aide de personne, tellement fort que du dos ils ont atteint le coeur, flagellé à mort. Je ne me pardonne pas.


Il était un vide. Les sentiments que je lui donnais, il les prenait, mais il ne pouvait les renvoyer, et ils se perdaient en lui, il n'en comprenait pas la portée. Non, il ne se cachait pas. C'était impossible pou lui, de se cacher comme de se montrer, lui qui après plus d'un an ensemble, avait du mal à se montrer nu devant moi. Je ne comprenais pas. Alors, comme une folle dans une cellule blanche, je me suis tapée la tête contre le mur qu'il était, jusqu'au sang, jusqu'à voir rouge. Chaque week-end, cette présence qui aurait du m'apporter la paix, la sérénité, le bonheur, me donnait des larmes et mon âme était twisted. J'ai supporté. Parce que je l'ai voulu, parce que je pensais que c'était ça, la vie de couple, que c'était aussi la souffrance.  Je n'avais pas tort, mais l'échelle était mauvaise. Je m'étais trompée de dose. 


Je me suis traitée de salope. Je me suis traitée de pute. Je me suis griffée les jambes jusqu'au sang, et j'ai pleuré une nuit entière sans pouvoir tarir la source de mes larmes. Et au matin, je me suis effondrée, le corps ne suivait plus. L'esprit criait encore. Une personne sait cela. Il se reconnaîtra. Il reconnaître ces mots que je lui ai écrit, dans une lettre, cet été. Mais il est temps de rendre les émotions au public pour qu'elles se perdent dans l'immensité de la foule et se diluent pour s'y perdre à jamais. 


Les mots étaient toujours sans conviction. Les sentiments n'en étaient pas, ils n'étaient qu'une façade comparés aux miens. Je lui ai tout donné. TOUT. Et tout m'a été renvoyé à le figure. Non, pas à la figure, EN PLEINE GUEULE. La cicatrice ne se voit que quand je pleure : les larmes empruntent toujours les mêmes sillons. Il ne savait pas les arrêter, il n'essayait même pas : il attendait que je m'épuise, que je me culpabilise, que je reconnaisse que j'avais tort alors que non, je n'avais pas tort, pas toujours. Et chacun de mes pleurs s'enfonçait un peu plus dans ma peau.


J'ai senti chaque atome d'amour sortir de mon corps, comme les gravillons qu'il y a plus de dix ans ma grand-mère avait sorti de mes plaies, un à un. C'était douloureux. Très douloureux. Je n'ai pas voulu lâcher prise. Je me revois, disant à Audrey que si, les sentiments étaient revenus, que rien n'était contradictoire, que j'allais me fiancer cet été et même que rien ne pouvait plus me réjouir que cette perspective, que tout irait mieux, beaucoup mieux à ce moment-là. Je me mentais. Je cherchais le déclic, je pensais que lorsqu'on se fiancerait, il saurait comme moi je savais, qu'il ferait des efforts pour me garder, mais je n'ai pas pu tenir jusque là, et c'est tant mieux, car cela aurait été une erreur. Une grosse erreur. J'ai freiné des quatre fers, mais la révélation fut lente. Exsangue. 


J'ai peur. J'ai peur que tout recommence. Pourquoi ? Peut-être parce que c'est un scientifique, comme lui. Peut-être parce que nous n'avons pas non plus de points communs. Mais je crois que c'est différent. On joue à armes égales cette fois. 

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