mercredi 26 octobre 2011

De profundis clamavi

Il est 17h40, presque 41, direction Truchtersheim par une petite départementale.
Le cimetière de Quatzenheim.
Noyé sous l'or liquide du soleil automnal.
Une de ces visions du monde, dans sa plus complète perfection, dans sa plus complète magnificence.
La rage de ne pouvoir la peindre.

Je voudrais pouvoir faire éclore, entre mes mains, comme une fleur sauvage, de celles qui ont les plus âpres parfums, cette image qui se trouve fixée derrière mes paupières.

C'est à la sortie de ce joli village, Quatzenheim. Banal petit bourg alsacien. Théâtre des quelques secondes  où pour moi, le monde s'est arrêté, le temps que mon cerveau s'abreuve de merveilleux. Un cimetière en pente douce, avec un petit muret de vieilles pierres pleines de lichen ; l'herbe y est encore verte, les arbres n'ont pas encore perdu leurs feuilles : l'automne les a surpris, ils n'ont pas encore eu le temps de changer de costume. Les tombes sont anciennes, et de grandes croix pierreuses sortent de terre, tournées vers le Levant, attendant l'Aube, toujours debout, comme ceux qui portent la foi, ne cédant pas sous le vent, la pluie ou la neige, immobile comme des géantes mystérieuses, muettes. Un cimetière. L'attente d'un monde meilleur. Le soleil est chaud, et il déverse sur ces guetteuses une pluie d'or, embrasant les tombes comme pour rappeler à leurs morts la rédemption qu'on leur avait promise : elle ne tarderait plus. 

Et c'est là où dorment les morts que je me suis sentie le plus proche de mes rêves.

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